Le blog d'Ernesti

Journée mondiale des aidants·es : témoignage d'une aidante

"J'allais la voir régulièrement et nous partagions déjà du temps ensemble. Mais après cette rupture de santé, elle m'a trouvée encore plus souvent à ses côtés. J'étais pratiquement là en permanence et de ce fait, le lien entre nous s'est encore renforcé." Madame G, Aidante de sa Maman de 93 ans.

Pouvez-vous vous présenter  ?

J'ai 68 ans, je suis en retraite après avoir été infirmière libérale pendant quarante ans. J'habite dans la région de Bordeaux.

Quel est votre lien avec la personne que vous aidez ?

Je suis sa fille. Ma mère, qui a aujourd'hui 96 ans, est veuve depuis de nombreuses années et s'est débrouillée seule jusqu'à ce que des problèmes de santé ne lui permettent plus d'assumer toutes les tâches de la vie quotidienne. Cela fait maintenant trois ans.

Pouvez-vous nous parler un peu d'elle ?

Maman a été femme au foyer pendant plus de vingt ans. Elle nous a élevés, nous étions quatre enfants. Mon père est malheureusement mort très jeune, à 50 ans, et il a fallu à ce moment-là qu'elle travaille pour que nous puissions poursuivre nos études. Comme elle savait coudre, elle a débuté dans un magasin de prêt-à-porter comme retoucheuse. Ensuite, en qualité de veuve, elle a pu entrer à la Trésorerie Générale de la Gironde où travaillait mon père avant son décès. Elle y est restée jusqu'à sa retraite, qu'elle a prise le plus tard possible pour pouvoir bénéficier d'un montant décent. Elle recevait aussi la pension de réversion de mon père. Elle a été très courageuse et a même passé des concours internes pour gravir les échelons.

Ma mère était une femme battante et dynamique qui n'a jamais baissé les bras. Nous étions encore deux en études lorsque notre père est décédé. J'avais 23 ans et notre plus jeune sœur, 17 ans.

Quand avez-vous constaté le changement qui vous a alerté sur la perte d'autonomie de votre maman ?

Après avoir eu des problèmes infectieux à 93 ans, elle s'est sentie très fatiguée et s'est bien rendue-compte qu'elle n'avait plus la même vivacité qu'avant d'être malade. Elle m'a sollicitée de plus en plus souvent, car elle était faible et ne pouvait plus assurer le quotidien, d'autant qu'elle a aussi des problèmes de vue. Ensuite, assez rapidement en fait, elle a commencé à perdre la mémoire... Elle a eu du mal à accepter de l'aide, même si cela a été moins difficile parce que c'était moi qui l'accompagnais dans cette nouvelle vie et non une personne inconnue. Sa condition l'affectait beaucoup et elle était triste de devoir dépendre de moi. Surtout parce qu'elle avait toujours été très vive et s'était toujours débrouillée toute seule. Elle assumait tout dans sa vie. Je lui disais aussi qu'à son grand âge, il était normal qu'elle soit aidée.  

Votre lien avec votre maman a-t-il changé à ce moment-là ?

Maman s'est forcément encore plus rapprochée de moi. Étant la plus proche géographiquement, c'est déjà à moi qu'elle demandait de l'aide si elle en avait besoin. Mon frère vit à Toulouse, ma sœur à Montpellier et notre autre sœur est décédée. J'allais la voir régulièrement et nous partagions déjà du temps ensemble. Mais après cette rupture de santé, elle m'a trouvée encore plus souvent à ses côtés. J'étais pratiquement là en permanence et de ce fait, le lien entre nous s'est encore renforcé.

Quelles ont été vos relations avec votre famille lorsque vous vous êtes rendu compte de sa perte d'autonomie ?

J'en ai surtout parlé avec ma sœur de qui je suis la plus proche même si j'ai aussi évoqué le problème avec mon frère. Fin janvier 2019, elle a eu une très violente infection urinaire qui lui a même occasionné un malaise. Et après ce gros problème de santé, elle n'a jamais remonté la pente.

Elle en a fait plusieurs ensuite, et encore aujourd'hui, et la mémoire, qui avait commencé à se dégrader fin 2018, a de plus en plus diminué. C'est après le premier malaise que j'ai décidé de rester auprès d'elle, car elle n'arrivait absolument plus à se suffire à elle-même. J'ai commencé à dormir chez elle sans savoir combien de temps cette situation allait durer. Je ne pouvais pas la laisser seule dans cet état-là.

Malheureusement, sa santé ne s'est pas améliorée et la situation a perduré. Je ne voulais absolument pas mettre ma mère en maison de retraite malgré la charge de travail et la charge mentale que représentait le choix de la garder à domicile, et ma sœur m'a suivie dans ma décision.

Comme j'étais disponible, j'ai décidé que je m'occuperais d'elle. J'échange très régulièrement avec ma sœur dont je suis très proche. Les relations avec mon frère sont un peu plus distantes  ; il a des problèmes de santé de son côté et puis, c'est un homme... c'est un peu moins facile de parler de tout cela avec lui. J'ai aussi des contacts très fréquents avec mes nombreux neveux et nièces. Je me sens très entourée et soutenue. Ma sœur vient aussi souvent qu'elle le peut.

Assumez-vous toute seule l'intendance au quotidien ?

Absolument  ! Ce ne peut être autrement. J'assume tout  : les courses, la cuisine, le ménage courant. Vivant avec elle, je fais tout ce qui est en mon pouvoir afin qu'elle vive dans les meilleures conditions, qu'elle mange bien. Si ma sœur vivait à Bordeaux, nous nous répartirions les tâches quotidiennes.

Je pense que de par votre métier, vous étiez sensibilisée au monde de l'aidance bien avant que votre maman n'en ait besoin...

Bien sûr  ! J'ai vu beaucoup de familles confrontées à ce problème-là. Je savais combien être aidant(e) est compliqué et lourd. J'ai aussi une amie, fille unique, qui s'occupe de sa maman. J'avais régulièrement son exemple en tête. Le rôle d'aidant(e) n'est pas évident, mais on le fait avec plaisir. J'ai accepté cela parce que je souhaitais m'occuper de Maman. Je ne voulais absolument pas qu'elle termine sa vie dans un EHPAD. Je pense qu'elle aurait été très dégradée sur le plan cognitif si elle avait dû se retrouver dans une structure sans ses affaires et sans connaître personne. Je suis heureuse d'être là pour elle.

De quelle façon avez-vous mis les aides à domicile en place ?

Pendant toute l'année 2019, j'ai pratiquement toujours été chez Maman. Ma sœur est venue me relayer, car j'avais prévu un court voyage. C'était au mois d'avril et Maman n'était pas encore trop mal. Je n'ai donc pas renoncé à ce séjour. Les nuits étaient très difficiles, car elle se levait plusieurs fois, jusqu'à 10 à 15 fois. Il y a eu des nuits très dures, mais j'étais en forme et j'arrivais à les assumer. En fait, j'ai pu profiter d'une année de répit entre le début de ma retraite et les problèmes de santé de Maman. J'ai pu récupérer de mes quarante années d'infirmière libérale et bien me reposer. Heureusement  !

Un jour, à la fin de l'année 2019, je me suis aperçu que j'étais de plus en plus fatiguée et j'ai décidé de mettre des aides en place. Je connaissais Ernesti par l'intermédiaire d'une patiente. J'ai donc fait appel à vos services, car j'ai pris conscience que je ne pouvais pas continuer à vivre des nuits aussi fragmentées dans la durée. Il fallait que je puisse dormir convenablement quelques nuits par semaine pour pouvoir continuer à m'occuper de Maman et de l'intendance tout au long des journées. Il n'était pas question que je mette ma santé en péril.

En plus des Chouettes, il y a aussi une aide ménagère qui vient deux heures et demie par semaine. En dehors de ces intervenants, il n'y a personne d'autre. J'avais demandé à une dame que je connaissais de venir quelquefois en journée pour me permettre de sortir quelques heures, mais cela n'a pas été concluant.

Qu'est-ce qui est le plus difficile pour vous à gérer d'un point de vue logistique ?

Je suis très bien organisée, mais ce qui est compliqué pour moi est que je ne peux pas la laisser longtemps. Mon absence ne peut pas excéder deux heures, deux heures trente au maximum. Je dois toujours me dépêcher lorsque je vais faire les courses. Je sors l'après-midi, au moment de sa sieste. Je suis rassurée lorsqu'elle est allongée même si j'ai tout organisé dans sa chambre pour éviter les éventuelles chutes. Elle a auprès d'elle une chaise percée, mais si elle s'y rend sans problème, elle n'a pas le réflexe de retourner se coucher lorsqu'elle a terminé. Elle attend que je rentre...

Comment votre maman a-t-elle vécu la venue des Chouettes à son domicile ?

Elle les a très bien acceptées. Ce qui est dommage, c'est qu'elle ne se souvienne pas d'elles après. Mais sur le moment, elle est très contente. Elle n'aime pas du tout qu'une personne lui fasse sa toilette  ; en revanche elle est ravie de voir les étudiantes arriver. Je suis heureuse moi aussi qu'elle les accueille avec tant de plaisir, car cela me rassure et me déculpabilise. Tout se passe vraiment très bien.

Avec Ernesti, j'aime beaucoup l'idée de l’intergénérationnel. Je trouve ce concept très intéressant. Ce travail permet aux étudiant(e)s de gagner un peu d'argent, et aux personnes âgées d'être stimulées de façon différente qu'avec nous. Je leur demande d'ailleurs d'échanger avec elle ou de regarder la télévision ensemble et de commenter ce qui se passe. C'est assez difficile de soutenir son attention, mais les Chouettes se débrouillent très bien. Parfois, elles la font chanter et chantent avec elle. Ce mélange est très enrichissant pour tout le monde.

Avez-vous de bonnes relations avec les Chouettes ?

Oh oui  ! Je reste un peu après leur arrivée à 20h afin de pouvoir échanger un moment avec elles. C'est convivial. Je m'intéresse aussi à leur vie. Cela me paraît important. En plus, comme j'ai demandé que ce soient des élèves infirmières qui interviennent, je peux parler de leurs études, de leur travail à venir et de mon expérience dans ce domaine avec elles. J'aime beaucoup ce relationnel.

Trouvez-vous que les services d'Ernesti ont répondu à vos attentes.

Complètement. Le seul problème est celui de la disponibilité des étudiantes les jours où j'en aurais eu besoin. Au début, je pensais faire intervenir les Chouettes lundi, mardi, mercredi et assurer les autres jours. Mais cela n'a pas toujours été possible de les avoir ces jours-là. Ça n'a pas été grave, car je suis très disponible, et je me suis calée sur leur planning. Mais je comprends que cela peut ne pas être simple à organiser, tant pour les familles que pour votre entreprise. Il est compliqué de prévoir les choses à l'avance.

Comment définissez-vous le fait d'être une aidante ?

Pour moi, c'est une qualité qui n'est pas donnée à tout le monde. Il faut être très impliqué. La tâche n'est pas simple du tout et c'est un vrai choix. Le côté affectif est très impacté. Il est très compliqué de voir ses parents diminués et de réussir à mettre la bonne distance entre les émotions et les actions. Ca demande beaucoup d'énergie. J'ai la chance que ma sœur me soutienne, même à distance. Il faut aussi savoir se préserver, d'où l'importance des aidants professionnels. Il faudrait que je puisse trouver des personnes qui s'occupent de Maman deux après-midi par semaine afin que je puisse avoir un peu plus de temps pour moi.

Que souhaiteriez-vous voir être mis en place pour soutenir la condition des aidants·es  ?

Le gouvernement a pris la mesure de cette charge et des aides financières (crédit d'impôt) ont été mises en place. Avant, tout cela n'existait pas, et on ne parlait pas du tout des aidants. Les gens étaient beaucoup plus isolés. Des associations peuvent intervenir dans les familles et il y a aussi cette possibilité de répit des aidant(e)s. Il y a eu de vrais progrès pour faciliter le maintien à domicile des personnes âgées.

Chez Ernesti, notre but est d’offrir aux personnes dépendantes la possibilité de rester chez elles aussi longtemps qu’elles le souhaitent et dans les meilleures conditions, quand bien même elles auraient besoin d’une présence la nuit.
Nos « Chouettes », étudiant·e·s dans les domaines de la Santé (médical et paramédical) sont disponibles pour venir de manière régulière assurer une présence la nuit au domicile de l’Accompagné.
La mise en place de gardes de nuits à domicile permet également aux Aidants de pouvoir prendre du recul et de se reposer, tout en sachant leur proche en sécurité.
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